Depuis plusieurs années, François Morin a engagé une réflexion sur notre économie très fortement financiarisée. Ses trois ouvrages « Un monde sans Wall Street » (2011), « La grande saignée » (2013) et « l’Hydre mondiale » ( 2015), décrivaient en détail les « turpitudes » de la finance dérégulée. On sentait clairement dans ces ouvrages monter l’inquiétude du professeur émérite d’économie qu’est François Morin, ancien membre du conseil général de France et du conseil d’analyse économique : la crise financière de 2008, qui a été génératrice de considérables dégâts, économiques autant que sociaux, risque fort de recommencer.
« La gravité de la situation telle que nous sommes dans l’obligation morale et politique, simplement comme citoyen, d’exprimer non seulement de validation et de colère, mais aussi de réfléchir d’agir pour un changement, dont l’utopie soit, si possible, réaliste »
Décrire cette utopie réaliste, c’est l’objet de l’ouvrage « L’économie politique du XXIe siècle ». Pour cela François Morin passe en revue de manière très pédagogique les grandes oppositions autour de quatre concepts économiques fondamentaux — la valeur, le travail, le capital et la monnaie, en se référant, entre autres, à John Maynard Keynes et à Karl Marx.
Partant du constat que la valeur-capital dans sa forme financiarisée se trouve à l’épicentre des multiples crises qui secouent actuellement notre planète, la thèse principale de l’ouvrage de François Morin, c’est qu’il faut refonder le travail autrement que par la soumission – dont il fait l’objet depuis le début du capitalisme – à la valeur-capital. Autrement dit passer de la valeur-capital, valeur qui fondent nos économies actuelles, à la valeur-travail, valeur qui devraient pouvoir fonder les sociétés de demain.
Mais l’ouvrage ne se contente pas d’une réflexion théorique (dont il faut souligner qu’elle est très pédagogique). Il propose des pistes de solutions concrètes :
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Limiter fortement le pouvoir du capital en renforçant le droit de la concurrence et le contrôle des mouvements de capitaux
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Réformer la gouvernance des entreprises en s’inspirant du modèle de l’économie sociale et solidaire.
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Faire passer la monnaie de son statut de bien privé géré par un oligopole bancaire à celui de bien commun géré par les États au niveau international, en facilitant la coexistence de monnaies complémentaires.
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Valoriser le travail de chaque citoyen grâce à un droit de tirage tout au long de la vie sur 3 comptes personnels : le compte d’activités le compte de formation et le compte de développement, le tout accompagné d’une révolution fiscale avec la création d’une taxe sur l’actif net.
En résumé, François Morin part du constat de base que « La nouvelle économie politique ne doit plus se bâtir partir du postulat que l’essence de la société civile est seulement le « besoin » et que son régulateur n’est que le marché ». Il nous propose de remettre l’économie au service d’une politique, et de refonder la démocratie par la monnaie, par la valorisation du travail productif et par le changement institutionnel.